Nouvelles | Finales Terra 56
Version de Franck Mars
La signature de l’eau
par franck Mars
La signature de l’eau
Franck Mars
Le vaisseau des Sourciers s’était posé deux jours plus tôt sur Nova Terra 56, dans une plaine de poussière turquoise, baignée par la lumière aux reflets grenat de l’étoile proche, et barrée au loin par une ligne de sommets dentelés, une chaîne de montagnes sans doute très jeune. Sur certains des pics, une calotte blanche étincelait dans la lueur rose. Des glaciers ? Difficile de dire à cette distance. En tout cas il y avait de l’eau sur Terra 56. C’était la raison principale de la présence des Sourciers. Les capteurs du vaisseau avaient détecté la signature de l’eau depuis l’espace, dans le spectre lumineux de la planète. D’une manière générale, Terra 56 présentait des conditions quasi idéales pour fonder une nouvelle Terre. Elle était à la même distance de son étoile que la Première Terre de son Soleil. Elle était un peu plus grosse que la Première Terre, la gravité y était donc plus forte, et l’air était plus chargé en dioxyde de carbone, mais rien que des combinaisons adaptées ne puissent compenser. Et il y avait du mouvement à la surface de la planète. Etait-ce des éruptions volcaniques, des vents violents balayant un paysage désert, des pluies ou des orages peut-être ? Ou bien était-ce autre chose, davantage… ? Y avait-il de la vie sur Terra 56 ?
Hateya Somari, la capitaine de l’expédition, une femme âgée tannée par des années d’expéditions spatiales, avait appris à ne plus l’espérer. Depuis des siècles que l’humanité s’était lancée à la conquête du cosmos, on n’avait pas trouvé la moindre trace d’existence extraterrestre, pas même une bactérie. L’homme se résolvait peu à peu à être seul dans l’univers. Et pourtant… Pourtant Hateya avait eu un pressentiment étrange, en apercevant pour la première fois l’horizon de Terra 56 par la baie vitrée de la dunette, ses deux lunes et son jour aux couleurs de crépuscule. L’équipage avait appris à se fier aux intuitions de sa capitaine. Certains murmuraient qu’elle avait des dons chamaniques, hérités de lointains ancêtres sioux, des indiens de la Première Terre. Plus simplement, Hateya avait un bon instinct, aiguisé par des décennies d’observation et d’exploration spatiale. Et cette planète… Aucune exoplanète n’était semblable à une autre, bien sûr, mais Terra 56 avait quelque chose de plus encore. Quelque chose de radicalement différent.
Le lendemain de l’atterrissage, l’équipage avait lancé la première expédition sur le sol, à bord de véhicules tout-terrain, en emportant de l’eau et des rations pour une semaine. Ils étaient partis en équipe réduite, Hateya bien sûr, puis Corey, le mécanicien du bord, un quadra aux cheveux vert vif, aux allures d’éternel adolescent, mais qui était capable de réparer n’importe quelle machine avec quasiment rien même au milieu d’une tempête de sable. A ceux-là s’ajoutaient deux ingénieurs, Léa et Oslan, deux jumeaux, une biologiste et un géologue, tous deux blonds et pâles, qui vivaient dans leur propre monde et se comprenaient presque sans parole. Et enfin Adrien Sorbier, un prospecteur au service des Compagnies Minières, le consortium privé qui finançait en partie l’expédition.
Au deuxième jour sur Terra 56, le petit groupe arriva au bord d’un ruisseau, à peine un filet d’eau qui serpentait dans la plaine turquoise. La chaîne de montagne s’était quelque peu rapprochée, et en pointant ses jumelles vers elle, Hateya aperçut comme des ombres sur certaines de ses pentes. De la végétation ? Plus probablement un caprice de la roche… La capitaine balaya l’horizon du regard. Les volutes de poussière masquaient une partie de la plaine. Agenouillés près du ruisseau, microscope en main, Léa et Oslan analysaient la composition de l’eau. Soudain Léa poussa une exclamation.
…
– Nom d’un chien Oslan !
Oslan, un trentenaire athlétique au tempérament serré, était accroupi au bord du ruisseau. Sans exprimer de surprise et de fébrilité, il leva les yeux en direction de sa sœur. Léa se tenait debout, les bottes en travers du ru, et paraissait goûter à ce cours d’eau miraculeux, comme si elle y était entrée pieds nus.
– Quelle joie… dit-elle. Depuis le temps qu’ils voyageaient à travers le cosmos, ces descendants de bons vivants et habitants des grands lacs, n’avaient plus l’expérience des plaisirs simples. Léa avait délaissé l’oculaire et déposé son appareil au sol. Elle était à présent tendue comme un arc, les bras levés vers le ciel. Elle prit une profonde respiration. Bon sang, il lui parut que ce mince filet d’eau avait toute l’âme et la puissance de ces rivières perdues de son enfance ; ce ruissellement et clapotis des flots qui fabriquaient des têtes de coton et hypnotisaient les oisifs. Plus que de découvrir une trace de vie extraterrestre dans l’intimité du ru extra-terrestre, un désir intense de s’y baigner l’envahit alors. Il ne lui restait qu’à tirer sur la fermeture éclair de son imposante combinaison, d’en extraire chacun de ses membres, et de se jeter à l’eau. Oslan s’était approché de sa sœur en silence, et la ceintura lentement pour contenir sa stupeur.
– Ce n’est pas une bonne idée, chuchota t-il à la radio, d’autant que nous ne sommes pas seuls ici. Regarde.
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